vendredi 26 février 2010

Edito de Kultorama - printemps-été 2010 - thème "The Escape"

L'échappée belle

Ça a commencé sournoisement. Il y a quelques mois de cela. Un premier pote annonce qu'il quitte son super job dans une super boîte avec de super responsabilités (et un super stress) pour faire de la sophrologie. Une amie lui emboite le pas : Ancienne programmatrice d'un gros club, elle veut se consacrer au tricot pour animaux et faire des massages à domicile, une autre connaissance démissionne d'une grosse agence de pub pour faire du folk de barbu. Quand c'est pas un ami d'ami qui arrête la musique pour faire du fromage bio dans un bled près des Pyrénées. Moi même, sur les conseils d'un ami DJ je me renseigne pour faire une retraite de quelques jours dans une abbaye. Comment en est on arrivé là ? Trop de raclettes entre amis annulés, trop de piles de livres fabuleux en retard, de disques (mp3) qui s'entassent dans le disque dur, de trajets en métro pénibles à se regarder en chien de faïence, de mauvaises blagues de bureau entendues à la machine à café. Et c'est pas prêt de s'arranger...le lip dup de l'UMP, la crise généralisée, le taux de chômage (et surtout les employés du Pole Emploi), les photos de traders rougeauds, autant de plaies qui n'inspirent qu'une chose : la fuite.

Il y a quelques jours justement ma mère (marseillaise) me parle d'un certain Henry Quinson, devenu le nouveau héros local depuis la publication de son autobiographie au titre évocateur Moine des cités, De Wall Street aux Quartiers-Nord de Marseille (éditions Nouvelle Cité/Prix 2009 de littérature religieuse). Le type enchaîne les télés et les radios en racontant sa vie. Son histoire? Ce franco-américain était un jeune banquier d’affaires (le golden boy typique) qui gagnait et flambait des millions de dollars avant de tout plaquer pour vivre dans un monastère en Savoie et habiter ensuite une cité HLM dans les Quartiers-Nord de Marseille. Il y a fondé une fraternité d'aide et d'échange. « Ce lundi matin 16 octobre 1989, je ne peux résister à la force qui m’habite. Je me lève : je dois démissionner… » raconte il dans son livre. Ca fait rêver. Et réfléchir. L'histoire du mec qui en a marre de sa putain de vie, plaque tout…et ne se retourne pas. Jamais.

Sans avoir suffisamment de couilles (ou d'armes ou de vêtements de cuir assez rutilants) pour exploser le système, on se calme les nerfs, on s'évade en écoutant le courant musical à la mode, la « chill wave ». Ca fait quelque temps qu'on n'écoute plus que ça, qu'on a d'yeux que pour la musique baléarique, tropicale ou cosmique. Le prochain Vampire Weekend s'annonce afro-pop, les percussions entendues chez Damon Albarn et ses derniers projets nous font prendre la tangente vers une contrée ensoleillée, et plus récemment Friendly Fires, Wavves, Neon Indian, Washed Out, Memory Cassette ou Fool's God enchantent par leur exotisme. On appelle ça l'escapism chez les Anglo-saxons: face à la crise, on fantasme un ailleurs musical meilleur.

En attendant, pour fuir un peu le morne quotidien, voici déjà une solution altenative, la lecture de ce numéro du Kultorama sur le thème « the escape » (du titre de la collection Kulte). On s'évadera avec un article sur la théorie du savoir revivre de Jacques Massacrier (principale influence sur cette thématique), la folie douce et la pop qui voit loin de Maman Records, les rythmes exotiques de Get Back Guinozzi!, le maxi galactique de Jan Turkenburg (le bien nommé « In My Spaceship »). On rêvera avec les illustrations poétiques de Stephane Manel. On se lovera dans du coton bio et on fera connaissance avec le magazine gratuit et « open-mind » Redux. Bon voyage!


Violaine Schütz

The Horrors - Chronique publiée dans le TSUGI n°19


 

The Horrors Primary Colours (XL/Beggars) De The Horrors, on a une image d'Épinal. Celle de cinq freaks anglais complètement goth (ils portent tout l'attirail croix-redingote noire et mascara qui coule du Dracula moderne), jouant un rockab de corbac (sur un premier album, plutôt flamboyant, « Strange House » sorti en 2007). Mais rien, si ce n'est un clip signé du grand Cunningham (ressorti d'une retraite spécialement pour leur beaux yeux cernés pour filmer leur tube punk « Sheena is a parasite » et devenu depuis leur co-producteur) ne laissait présager de quoi était vraiment capable le sanglant quintet. Dès les premières notes- incroyables de panache- de « Mirror's Image », l'entrée fracassante de leur nouvel album, Primary Colours, Bauhaus se retire, pour accueillir une densité électronique digne de Brian Eno. Dès lors, la redingote anthracite côtoiera systématiquement la lumière du jour, celle d'un jour nouveau, celui de l'illumination analogique. Alors certes les guitares sont toujours grinçantes (« Three Decades », du Interpol au sommet) mais l'orgue hypnotique (celui de Nico, période new-wave) et dansant lui vole constamment la vedette. Dans un donjon troué de lumineuses envolées shoegaze, la voix ressucite Ian Curtis et les Chameleons, mais la basse swingue, la pop lyrique (école Echo & the bunnymen) s'en mêle, et Geoff Barrow (de Porstishead) à la prod, berce le tout d'une belle douceur dub. On le savait certes depuis le plus premières heures du post-punk, la mort peut danser. Mais on ignorait encore qu'en 2009, elle pouvait enchaîner des chorés aussi magiques. De la « dance » macabre magnifique, voilà ce que ces cinq horreurs ont inventé avec leurs couleurs primaires. Et aucun kid fluo n'a jamais fait plus beau ! (Violaine Schütz)

Boys Noize Interview - Papier publié dans TSUGI

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Boys Noize
Revolution 808
Texte de Violaine Schütz

http://20watts.files.wordpress.com/2008/10/boys-noize-oi-oi-oi.jpg
On croyait l’Allemagne complètement minimale, et puis, il est arrivé : Boys Noize. Nom pluriel cachant un seul homme, Alex Ridha, jeune Berlinois multi-facettes qui depuis deux ans fait figure de plus belle promesse électronique mondiale. Confirmation avec un premier album rare, entre techno élitiste et funky-électro-rock pour tous.

Je fais de la “power-electronic-banging-techno”. Oubliez toute cette merde de new-rave. Ici commence la fête techno”! Boys Noize, 24 ans, n’est pas peu fier. Mais il a les moyens de son discours. Non seulement son premier album, Oi Oi oi -que l’on attendait impatiemment après deux ans de maxis et remixes rutilants- ne déçoit pas, mais il prouve aussi qu’il y a un après Justice. Rencontre avec le nouveau petit prodige du compresseur et de la roland tr-808 qui compte parmi ses fans les Daft, Erol Alkan, The Rapture, Marilyn Manson…Et peut-être vous.

Le grand frère
Hambourg. Son lac artificiel, ses espaces verts, ses petits vieux et son ennui profond. Alex Ridha, ado errant dans la ville ne sait pas trop quoi faire de ses journées et de sa créativité débordante. A 14 ans, il tague les murs d’Hambourg de mots forts et prometteurs. Parmi eux, « Boys Noize ». L’Allemagne est bien calme, mais déjà le garçon rêve de bruit et de fureur. Un grand frère de 10 ans son aîné lui fait alors écouter de la house de 86-87 sans qu’il ne sache encore qu’il s’agit de musique électronique. « Mes parents m’avaient inscrit dans une école de piano à 12 ans. Mais moi, je voulais jouer de la batterie à tout prix. Du coup j’ai appris tout seul en écoutant mes morceaux préférés et en essayant de les reproduire. Et puis, à 14 ans, j’ai trouvé un logiciel tout pourri sur mon ordinateur pour faire des tracks. J’ai écrit mon premier morceau à 16 ans dans le studio d’un pote. La sensation ressentie en créant des morceaux entièrement tout seul a été si forte que je n’ai pas dormi beaucoup pendant deux semaines, durant lesquelles j’ai enregistré 15 chansons. C’était fantastique comme sensation ! »

Berliner
A 21 ans, amoureux, Alex, qui a appris les techniques de production en cinq ans, déménage à Berlin pour suivre sa petite-amie. C’est là qu’il commence vraiment Boys Noize. Remarqué dès 2003 par Dj hell, qui signe son premier maxi sur son label Gigolo, il devient rapidement un jeune DJ over-booké (du Japon aux USA en passant par l’Australie), multipliant ses productions sous son nom ou d’autres pseudos (comme Puzique). Mais ce sont surtout ces remixes qui attitrent l’attention. Ceux qu’ils signent pour Depeche Mode, Bloc Party et Kaiser Chiefs imposent son style à la fois rude et groovy, avec quelque chose de punk et de surpuissant à la fois dans sa manière de maltraiter les pointures rock dans le monde entier. Sa plus belle relecture demeurant celle du « My Moon, My Man » de Feist, somptueuse rencontre entre la brutalité rentrée du premier et la sensualité trouble de la comparse de Gonzales. « Feist, c’était le challenge parfait et j’aime les défis. J’adorais sa voix et je voulais faire quelque chose de « doux » pour elle. Je ne peux pas remixer une chanson que je n’aime pas. Pour moi, un bon remix, c’est quand la musique est totalement différente mais que tu as réussi à garder le feeling de l’originale. »
Punk un jour…
Mais Alex ne se contente pas de remixer les autres, c’est aussi un défricheur. En 2005, il fonde son propre label, Boys Noize Records, pour bénéficier de plus d’indépendance. « J’avais beaucoup de morceaux que je voulais sortir et les labels sur lesquels ils étaient parus auparavant mettaient tous un an à les éditer. Il s’agit plus d’avoir une plateforme pour ma musique et pour délivrer de la bonne électro en donnant à de jeunes inconnus (comme le duo corse Les Petits Pilous, ndr) la chance de sortir leur musique que d’avoir deux remixes pour plaire aux fans de minimale. Mais je n’ai jamais fait de promo, ni de marketing ou de management. Et je ne collaborerai jamais avec une boisson énergétique ! Du coup, le label reste underground. C’est pourquoi les fans ont le sentiment que Boys Noize Rec est leur truc à eux et que personne d’autre ne le connaît, et qu’ils l’aiment. »
Indépendant, DIY, et farouchement opposé à tout formatage, l’attitude d’Alex est exemplaire. « Ce qui m’intéresse en musique, c’est l’originalité, ce qui n’a encore jamais été fait. » Son premier album, qui ne s’intitule pas Oi Oi oi, pour rien, est dans cette lignée. L’œuvre d’un chanteur-dj-producteur autodidacte qui a sort l’objet sur son propre label, et impose son « style » à l’image de la tête de mort-boule à facettes de sa pochette. Entre ombre et lumière, dancefloor et cave, bruit et mélodie, tristesse et joie, Boys Noize, ex ado révolté est peut-être aujourd’hui père d’une révolution.

Oi Oi oi (Boys Noize Rec/La Baleine)
www.myspace.com/boysnoizemusic


dimanche 21 février 2010

Empire Of The Sun Interview - Article publié dans le TSUGI n°17

http://sounddepth.files.wordpress.com/2009/08/empire-of-the-sun.jpg

Empire Of The Sun

Texte de Violaine Schütz

Après Modular et les Midnight Juggernauts, l'empire australien a enfanté d'un autre fantasme hype : Empire Of Sun, groupe à la fois fluo, électro, pop et cosmique. Mais derrière le make-up outrageant et le discours fumeux, ces MGMT version 80's ont plus de tubes dans leur besace à franges et paillettes. Rencontre aux allures de LSD trip avec deux androïdes d'une nouvelle ère.


A quoi ressemble le son de 2009? Très exactement à Empire Of The Sun, duo australien formé en 2007 par Luke Steele (guitariste et chanteur des très bons Sleepy Jackson) et Nick Littlemore (moitié des excellents Pnau), dont le premier album, Walking On A Dream, résume à lui seul toutes les tendances du moment. On y trouve les mélodies d'électro-pop baléarique plaisantées par tous les hipsters, une production 80's très léchée proche dans l'esprit de celle tentée à Nantes autour du blog Valérie (Minitel Rose, Anoraak), et en Australie par le label Modular et surtout cette volonté si post-moderne de remettre au goût du jour des références de très mauvais goût comme Fleetwood Mac, ou-pire- Kajagoogoo. on comprendra pourquoi, le premier album de l'Empire du soleil, s'impose comme le fantasme ultime et éblouissant du branché moderne qui n'hésitera pas d'ailleurs pas à crier aux « nouveaux MGMT ». D'un autre côté, on comprend bien comment Empire Of The Sun, et son délire costumé « boule de cristal-tigre du bengale-mocassins blancs-patchouli-voix lactée» va s'imposer en cauchemar absolu pour le nerd fan de fugazi ou l'amateur d'électonica mentale et pointue ; Mais le propos d'Empire OF The Sun n'est pas de complexifier la pop musique, à la manière d'un Metronomy ou d'un Hot Chip, mais plutôt de renouer avec une certaine notion de l'amusement, du divertissement et de la musique comme spectacle étonnant. C'est la grandiloquence de Bowie quand il inventait un personnage, le show-off des séquences déguisées et maquillées hilarantes de Phantom Of Paradise et Rocky Horror Picture Show, le ridicule des pires heures du glam rock et surtout, tout le mouvement néo romantique des années 80, que les deux zinzins australiens d'EOTS ressuscitent en trente minutes chrono d'interview de visu. A la manière d'un Adam Ant, qui à travers ses costumes de pirate new-wave apportait à une pop FM devenue chamallow un peu plus d'imagination, de folie, et d'excentricité, interviewer Empire Of The Sun, c'est retenir une crise cardiaque par seconde face à un décorum -sans doute un peu calculé- aussi et kitsch et flamboyant qu'hors du commun. Dans un cadre parfaitement adapté-le très rococo hôtel Murano, ses crocodiles en plastoc, son faux feux de cheminée, ses moquettes d'ascenseur strassées- le duo reçoit en toute simplicité dans une chambre avec piscine sur la terrasse. Assis sur le canapé blanc, Nick (programmation), sosie du beau gosse de MGMT, quelques cheveux blancs en plus, porte une djellabah de velours noir brodé, et une volumineuse coiffe de plumes indienne, sur des baskets et un jean. Plus fort encore, Luke (chant, guitare) se tient à ses côtés, paré d'un maquillage futuriste très San Ku-Kaï, de cheveux blond platine en pétard, d'un caftan rose fuchsia, de pendentifs hippies fleuris, de pantoufles et -pour couronner le tout- d'une énorme tiare dorée à pompons oranges. Tout en finesse, à l'image de leurs photos promos dignes des meilleurs tableaux d'héroïc fantasy à licornes abandonnés chez Emmaüs. On ne pouvait donc dignement pas s'attendre à ce que leurs réponses soient fades, ou sensées.


Vous souvenez vous précisément de votre première rencontre?

Nick : Oui, très bien. La première fois que j'ai rencontré Luc, c'était en 2000, à Sydney, et il portait tout le temps une grosse valise en cuir avec lui, qu'il ne lâchait jamais à tel point que je me demandais ce qu'elle pouvait bien renfermer. Il n'arrêter pas de faire des pauses pour regarder ce qu'il y avait dedans; Au bout d'un moment, je lui ai demandé si je pouvais jeter au œil au contenu. Il l'a ouvert, et dedans, se trouvait une mini forêt tropicale avec des petites grenouilles vivantes et des petits arbres luxuriants. C'était totalement incroyable, magique. Le jour d'après on a commencé à bosser ensemble dans mon studio et il avait encore sa valise. Je lui ai demandé si il avait amené les grenouilles avec lui. Il m'a dit « non, pas aujourd'hui ». J'ai vu que la valise brillait, il l'a ouverte, et c'était comme une boite à musique recréant une mini discothèque avec de la musique électronique. Et à chaque fois que je l'ai revu les premières années, il avait toujours un truc différent dans sa valise, c'est ce qui m'a fait comprendre que je voulais vraiment faire de la musique avec lui.


Quels genres d'ados étiez vous?

Nick : J'étais très timide et j'avais peur des filles. J'avais même pas de sœur, alors je ne savais pas ce que c'était. A la place, j'avais un grand frère vraiment bizarre, un gothique, avec de longs cheveux noirs. Dès l'âge de 14 ans j'ai commencé à faire de la musique pour m'occuper parce que je me faisais vraiment chier dans la vie.

Luke : Moi j'étais un ado pas cool du tout, personne m'invitait aux fêtes organisées par l'école. A lors j'avais crée un studio au sous sol de l'appart de mes parents appelé le donjon dans lequel je descendais avec mon quatre pistes et une caisse de six bières; C'était mon secret, j'invitais personne au donjon. Et surtout pas les kids cool.


Quand avez vous su que la musique deviendrait toute votre vie ?

Luke : Mon père était musicien, et il l'est toujours, (il s'agit du chanteur de country-blues assez ringard Rick Steele, ndr).Quand j'avais 12 ans, il restait au pub jusqu'à pas d'heure et parfois il m'amenait avec lui. Il y avait aussi toujours plein de jolies filles partout où on allait, des pédales d'effet à la maison et on faisait des trucs géniaux comme aller pécher dans l'Est de l'Australie, ensemble. Ça ma donné envie de cette vie là : rester éveillé jusqu'à six heures du matin, en buvant des bières.

Nick : Quand j'ai eu 11 ans, j'ai eu une caméra en cadeau, puis j'ai commencé à filmer un peu n'importe quoi. J'avais tout un tas de films expérimentaux, et je voulais une bande son. C'est alors que j'ai débuté dans de la musique totalement inaudible, conceptuelle et bruitiste avec des boîtes à rythme.


Et votre album pourrait justement être une bande-son de film?

Nick : Exactement! D'ailleurs, dès qu'on a commencé à enregistrer l'album, on a pensé à faire un film en même temps. Pour nous, le cinéma est la forme d'art la plus globale et le son est aussi important que l'image dans notre démarche. C'est pour ça qu'on a tourné le clip « Walking on a dream » à Shanghai, et d'autres scènes au Mexique, avant d'aller en Islande, à Las Vegas et en Afrique. Le tout formera un film initiatique dont l'inspiration première est La Montagne Sacrée, d’Alejandro Jodorowsky (1973). On y voit une sorte de Christ nu en quête de lui-même. Mais on est aussi très inspirés par l'univers de Peter Greenaway, Chris Marker et Truffaut. On a pensé l'album comme un scénario avec diverses séquences qui constituent les étapes d'un voyage particulièrement épique et coloré. Un vrai road movie spirituel! Notre album es une histoire, pas une collection de chansons!


Et Empire Of The Sun, c'est un long métrage de Spielberg, adapté de J.G. Ballard, c'était pour le film ou le livre que vous avez choisi ce nom?

Nick : Pour aucun des deux, c'est par rapport à la puissance du soleil, qui nous accompagne partout, et fait partie intégrante de toute notre existence. (A ce moment là, un rayon lumineux envahit la chambre). D'ailleurs, est-qu'on peut se déshabiller? (il fait très chaud tout d'un coup. Ils enlèvent leurs couvres chefs respectifs. Et boivent un peu de vin blanc.)

Tsugi : Allez-y, je ne tourne pas de film.

Nick : Tu veux prendre un bain dans la piscine? (Je décline poliment l'invitation pendant que Luke trempe un pied dans l'eau qui a l'air glacée, ndr)


Vous semblez vouloir délivrer un message à travers votre musique un peu mystique, quel est-il ?

Nick : On veut faire quelque chose qui n'a jamais été fait, et dépasse tout ce qui existe. Nous avons crée des personnages et tout un empire qui va avec. On veut changer le monde grâce à notre musique et ce qui l'entoure, y mettre un peu plus de pureté, de joie et de spectaculaire!


Walking On A Dream (EMI)

www.myspace.com/empireofthesunsound



mardi 9 février 2010

Get Back Guinozzi !


Texte de Violaine Schütz
publié dans TSUGI

Get back Guinozzi!

Psycho-pop

Avec leur mix de reggae, post-punk, musique tropicale et surf 60s, les français de Get Back Guinozzi! livrent avec « Carpet Madness » une réponse enjouée à l'exigeante excentricité des américains d'Animal Collective. Et si GBG! était la meilleure chose qui soit arrivée à la pop frenchy depuis Elli et Jacno?

Dans un café face à la Gare du Nord, une jolie brune en veste imprimée « jungle et fauves », et rouge à lèvres rouge sang, sirote un jus d'ananas : « C'est moi Eglantine Gouzy, Indiana Jones de la musique. J'ai eu un accident à la jambe il y a quelques années suite auquel j'ai du resté enfermée à la maison pendant deux ans. Après ça, j'avais envie de faire de la musique autrement, ne ne pas m'installer musicalement ou intellectuellement. Je suis partie en 2008 dans la jungle indienne. j'étais comme Mowgli dans la forêt, je chantais comme un babouin, c'est là que j'ai été recontactée par mon ami Fred. »

C'est ainsi qu'est né Get Back Guinozzi!, le projet d'Eglantine Gouzy, ex étudiante aux Beaux-Arts, parisienne exilée à Londres de 35 ans, compositrice de no-wave arty sur une compilation du label allemand Monika (For Woman No Cry en 2005) et un premier album éponyme solo foutraque (en 2006), et Fréderic Landini. Tout aussi électron libre, ce dernier vit à Toulon, affiche 46 ans au compteur et une âme d'adolescent. Après avoir fait partie d'un collectif de hip hop dans le sud, et lancé plusieurs sound-systems reggae, Fred dirige le défricheur Midi festival à Hyères. Autant dire que l'union de ces deux figures atypiques ne pouvait qu'être fantasque.

Sauf qu'en vérité, la musique du duo est encore plus dingue. Carpet Madness, le premier album farfelu de GBG!, compile tout à la fois le Cure des débuts pour son exotisme, Ariel Pink pour les délires lo-fi, le sens de la mélodie nostalgique des Smiths, la folie des Talking Heads, mais aussi le minimalisme élégant des Young Marble Giants. « On fait de la musique en toute liberté, raconte Fred, alors qu'on évolue dans un monde hyper codé. C'est pour ça qu'on a aimé les images montées par Jean Luc Charles, photographe et réalisateur pour le Midi Festival, qui a compilé pour notre premier single, « Low Files tropical » des archives hédonistes d'une boite de nuit qui appartenait à son père à Bandol, dans les années 70. Ce lieu a été plastiqué plusieurs fois. »

« Libertaire » c'est le mot qui convient le mieux aux chansons de « Carpet Madness », aussi bien musicalement parlant (on navigue sans arrêt entre voix pop naïve, reverb caribeenne, percussions afro et beats électronica) que textuellement. Les paroles d'Eglantine, fantaisistes à souhait, partent à peu près dans tous les sens et invitent à se défaire de toutes nos habitudes en matière de clichés rock. « Pour le morceau « Carpet Madness », le point de départ c'est Saint Macloud, enfin l'équivalent du marchand de tapis en Angleterre. J'ai une photo terrible de moi devant la vitrine où j'ai l'air d'une folle, et j'ai eu des histoires très compliquées dans ce magasin. Il y a aussi du Ariel Pink, du Gainsbourg dans les influences. « L.A » c'est Donna Summer rencontre Bret Easton Ellis. Mais il y a aussi Morrissey, King Kong, Elvis, Roy Orbison dans cet album. En fait, je joue tous les personnages à la fois, ce qui est complétement schizo, je l'admet. »

Schizo, certes, mais surtout jouissif pour l'auditeur blasé, qui ne peut être fou de joie à l'écoute de tant de fraicheur et d'inventivité.

Carpet Madness (Fat Cat/Discograph)

www.myspace.com/getbackguinozzi