jeudi 11 novembre 2010
Papiers clubbing pour Trois Couleurs
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Waves Machines chronique pour Tsugi
Wave Machines |
13-08-2010 | |
Wave if you’re really there (Neapolitan/Guess What) Wavves, The Shortwave Set, The Wave Room, The Wave Pictures, au bout d’un moment, on a fini par se noyer dans un ruisseau : trop de groupes surfaient sur la vague du patronyme maritime sans être le raz-de-marée pop annoncé. Pour les Wave Machines, originaires de Liverpool (le sang des Fab Four coule donc dans leurs veines), il devrait pourtant en être autrement. Mélangeant la fraîcheur tropicale de la scène lo-fi chillwave américaine aux arrangements synth pop 80’s de Cut Copy, et à un art de la mélodie pop qui se retient typiquement british, le groupe pourrait avec son premier album, Wave if you’re really there, fait chavirer bien des coeurs. “You say the stupidest things” a la fraîcheur poétique de groupes de twee pop oubliés (Lotus Eaters, Atzec Camera), “I go I go I go” est un tube renversant comme si Phoenix nageait un crawl avec Gorillaz et MGMT. Le désabusé “Punk Spirit” (“Where is my punk spirit when I need it ?”) évoque un Pete Doherty animé de la verve ironique d’un Morrissey. Il n’y a bien que les Anglais qui savent faire ça : de la pop qui fait bouger les pieds en même qu’elle nous inonde d’une vague mélancolie. (Violaine Schütz) |
Micachu and the Shapes / Chronique pour Tsugi
Micachu & The Shapes |
16-07-2010 | |
Jewellery (XL/Beggars/Naïve) Chaotique, foutraque, baroque et bancal, le premier album de Micachu & The Shapes (deux filles et un garçon), Jewellery, n’est pas à mettre entre toutes les oreilles. Cela s’explique en partie par le parcours de sa leadeuse, Mica Levi, jeune Anglaise de 21 ans qui a suivi des études de musique classique au conservatoire avant de composer une symphonie pour l’Orchestre philarmonique de Londres. Lui en reste un certain goût pour le désordre et les expérimentations en tout genre. Mica chante comme un homme, bidouille des bribes de mélodies rock, folk et électro, invente des instruments (elle a fabriqué une guitare qu’elle a appelée “chu”), convie un aspirateur (“Turn Me Well”) et même quelques verres cassés. Une démarche qui n’est pas sans rappeler celle du turbulent Matthew Herbert, qui produit justement ce premier essai. Le résultat ? Parfois c’est aussi obscur qu’une performance arty ratée (le cri de “Sweetheart”), à d’autres moments c’est mignon comme du Cocorosie possédé par le démon (“Curly Teeth”). Mais dans tous les cas, on ne pourra pas reprocher à Micachu son manque d’originalité, de recherche ou de prise de risques. Sans crier à la perle rare, Jewellery est de ces joyaux bruts qu’on mettra beaucoup de temps à tailler. (Violaine Schütz) |
Interview exclusive : un Phoenix raconte le concert avec Daft Punk à New York pour Tsugi
Interview exclusive : un Phoenix raconte le concert avec Daft Punk à New York |
29-10-2010 | |
C'était l'événement musical de la semaine dernière, et l'un des membres de Phoenix, Deck D'Arcy, a accepté de revenir sur ce concert déjà mythique. Une jolie exclu rien que pour vous.
Le 20 octobre, dans la gargantuesque salle new-yorkaise du Madison Square Garden, Phoenix était le premier groupe français à jouer live devant 28000 personnes. Mais ce n'était pas le seul événement d'anthologie. Pour le rappel, leurs amis d'enfance Daft Punk, absents sur scène depuis quatre ans les ont rejoint pour un « boeuf » entre copains. Réaction à chaud de Deck D'Arcy (basse, clavier) de Phoenix, en direct de Miami pour la dernière date américaine du groupe.
Peux-tu nous raconter le Madison Square Garden, de l'intérieur ?
Ce qui nous a fait plaisir c'est qu'on a réussi à amener notre truc, à rester nous-mêmes, dans une salle qui n'est pas vraiment faite pour jouer. Normalement il y a des choses sur-humaines comme Paul McCartney. On n'est pas censés jouer dans ce genre de salle. En fait on était surtout content car on a pu jouer avec des groupes qu'on adore comme Wavves et Dirty Projectors, qui ont composé l'un des disques qu'on a le plus écouté en 2010 (avec l'album de Girls). On voulait faire une affiche complètement bizarre et inédite par rapport au Madison Square Garden. Dans un lieu aussi grand, on peut se permettre des choses jamais faites avant. Du coup on a installé tout un système de lumières au plafond, qui n'avait jamais existé là-bas et pour une fois tous les plans qu'on avait prévu ont fonctionné. Et puis il y avait les Daft ! En fait c'est étrange de jouer avec des amis avec lesquels on a pas fait de live depuis longtemps. Le dernier concert avec eux c'est quand on avait 15 ans, au début des années 90, au moment où Laurent jouait dans Darlin' (groupe associant des membres de Phoenix et Daft Punk avant que les deux entités actuelles ne se forment, ndlr). Depuis on avait jamais rejoué ensemble alors qu'on avait chacun plein de concerts et une carrière de chaque côté. Ça faisait vraiment bizarre, après tout ce temps.
L'idée est venue de qui ?
C'était une idée à laquelle on pensait depuis un petit moment. Les Daft qui vivent aux Etats-Unis sont venus nous voir en live et ça a du leur donner envie. Un mois avant on était à Hollywood, on a fait une grosse salle, le Hollywood Ball, et on a failli le faire là-bas car les Daft habitaient juste à côté. On l'aurait bien fait à Paris, mais il n'y avait pas de date de prévue à ce moment-là. Deux semaines avant New-York, on s'est décidé. On ne l'a dit à personne, on a vraiment essayé de garder le secret jusqu'au dernier moment et apparemment les gens ne le savaient pas.
Quelles ont été les réactions immédiates du public ?
Ce qui est drôle c'est qu'on ne s'en est rendus compte qu'en matant les vidéos youtube. Et là c'était très amusant d'entendre crier « Oh my god ! ».
Vous aviez répété avant ?
Oui, mais en fait les Daft ont fait comme d'habitude, des mash-up's. On a très peu répété ensemble, mais ils ont beaucoup travaillé de leur coté. Et ensuite ils ont mis leur musique sur la nôtre.
Ils ne sont donc pas devenus inaccessibles ?
Pas du tout ! On s'est moins vu car ils habitent aux States et nous en France, mais ils sont toujours les mêmes.
Deux groupes d'envergure internationale peuvent donc encore se faire un « boeuf entre copains » ?
C'est toujours notre idée de rester amateurs, de ne pas devenir trop professionnels. On a abordé le Madison comme on aurait fait la Boule Noire. Et le lendemain, on jouait dans un bled, devant 300 personnes. C'est ça qui est cool!
Propos recueillis par Violaine Schütz |
mardi 2 novembre 2010
vendredi 22 octobre 2010
jeudi 23 septembre 2010
jeudi 29 juillet 2010
Lonelady Interview - Paru dans le magazine TSUGI de mars 2010
Lonelady
La dame noire
Texte : Violaine Schütz
Les cheveux de La Roux, le franc parler du Gossip et la noirceur galvanisante de The Horrors, Julie Campbell alias Lonelady a tout de la « next big thing ». Mais la Mancunienne signée chez Warp ne jure que par The Fall, Wire et le côté sombre de la force. Rencontre avec une cavalière solitaire.
Tu es une femme qui fait du rock sur un label où on trouve en majorité des hommes et de l'électronique, comment vis-tu ta signature chez Warp?
Ça doit être mon côté « seule contre tous », « lonelady » (rires). J'ai choisi ce pseudo pour signaler l'idée de chasseur solitaire mais aussi pour l'idée du masque. Si je m'étais appelée Julie Campbell, tout de suite ça faisait chanteuse qui se prend au sérieux. Lonelady, c'est quand plus soft, et mystérieux.
Tu es chanteuse et guitariste, as-tu toujours voulu être musicienne ou du moins artiste ?
Enfant, j'étais persuadée que je ferai quelque d'artistique plus tard parce que je passais des heures à dessiner dans mon coin et que tout le monde trouvait ça un peu bizarre. J'ai choisi des études d'art à l'université que j'ai fait durer le plus longtemps possible pour ne pas avoir à me confronter au monde réel. J'étais bien contente d'avoir ce prétexte pour pouvoir continuer à apprendre des choses et à être créative sans qu'on me tombe dessus. Je jouais dans un groupe et organisais en même temps des expositions de mes dessins, peintures, sculptures. Et j'écrivais des poèmes dont certains publiés dans des revues d'art obscures dont une montée avec mon frère, et assez peu rentable. Tous les boulots que j'ai eu comme rentrer des données sur informatiques sur un ordi m'ont rendu dingue. Je n'ai jamais réussi à avoir un job à plein temps...
Et pourquoi avoir choisi la musique alors au final, et pas les arts plastiques ou la poésie ?
Écrire des poèmes et des paroles, c'est la même chose : tenter de traduire de l'intimité confuse en quelque chose de plus abstrait, d'un minimum universel et de pas trop cru. Pour la musique, en fait, je me suis retrouvée à un moment, en 2005, avec une boite à rythme et une guitare seule chez moi, avec pas grand chose à faire. J'avais un quatre pistes et j'ai pu faire des enregistrements très vite. Avec mes maquettes diy assez cheap, j'ai démarché les magasins de disques et les bars pour y jouer. Je ne pouvais pas faire de concert en dehors de Manchester car j'avais ni permis de conduire. Il me semble même avoir passé, désœuvrée, une petite annonce sur myspace à ce moment là pour trouver un chauffeur (rires).
Tu as grandi à Manchester, à quel point ça a influencé ton premier album, Nerve Up?
Je suis née là bas, j' y ai toujours vécu, et je compte pas me casser d'ici de si tôt. L'histoire musicale très riche de Manchester est omniprésente, mais en filigrane. Les Mancuniens ne sont pas dans la commémoration visible. La ville a beaucoup changé, tout a presque été détruit de cette période. Je ne voulais pas enregistrer l'album dans un studio normal et j'ai cherché partout un immeuble où je pourrais me reconnecter avec cette atmosphère passée. J'ai finalement trouvé une sorte de bunker, un moulin vide près d'un canal. J'y ai enregistré le disque seul, pendant 21 jours, avec quelques visites de Guy Fixsen, qui a produit l'album (et aussi les Breeders, Stereolab, My Bloody Valentine, ndr). J'y ai construit un studio complètement isolé de mes mains, dans lequel j'enregistrais dans le noir et le froid pour arriver précisément au son que je voulais.
C'est quoi la grosse différence entre Manchester et Londres?
Si j'avais vécu à Londres, je n'aurais rien enregistré. L'industrie londonienne est une machine écrasante où les médias et l'aspect financier règnent en maitres. Tu es obligée de penser à la réception d'un morceau, à son audience potentielle et à comment tu te situes dans la scène actuelle au moment même où tu l'écris, à Londres, ce qui perturbe la donne dès le départ.
Et que penses tu de la musique anglaise d'aujourd'hui?
Tous les groupes se ressemblent. Il y a quelques années, tous voulaient être les nouveaux Joy Division, puis les Libertines, et ensuite les Arctic Monkeys. Les labels veulent signer des émules des derniers groupes qui marchent pour diminuer les risques et vendre tout un idéal de vie autour d'eux. Je lis pas le NME parce que ça me déprime. Au départ on fait de la musique parce qu'on se sent différent et au final on tombe dans l'uniformisation.
Ton album reflète des influences très 80's, pourquoi es-tu si attachée à cette période?
J'aime l'anxiété « nerf à vif » contenue dans cette période musicale de la fin des 70's et du début des 80's. Les sons de guitares nerveux du post-punk, la brutalité de Pil, The Fall, Gang Of Four et Wire (dont Julie a depuis assuré les premières parties anglaises en 2008, ndr), les premiers REM, A Certain Ratio, Joy Division, Pylon. Ces groupes avaient de l'énergie dans leur désespoir, du panache, de la flamboyance. Ce n'était pas de la musique « facile ». Mais il m'arrive aussi d'écouter Judy Garland (rires).
Qu'attends-tu exactement de la publication de ce premier album?
Je ne cherche pas à devenir quelqu'un ou la nouvelle Lady Gaga (de toute façon j'ai pas le look de l'emploi). Cet album n'est qu'un documentaire de quelques années de vie, mais qu'il entre chez quelqu'un qui l'achète (parce que sans être contre la technologie, il y a plus bandant que télécharger une chanson) et fasse partie de ça vie, rien que ça, ce serait déjà pas mal.
Nerve Up (Warp)
samedi 13 mars 2010
Brazilian Girls - Article publié dans Trax en février 2007
Non, les Brazilian Girls ne sont pas un troupeau de naïades échoué sur une plage de Sao Paulo. Mais ça n’empêche pas le quatuor new-yorkais de dub cool d’être sacrément sexy et culotté.
Heure très tardive dans un petit club londonien. Les Brazilian Girls montent sur scène. Leur chanteuse, presque nue, mais recouverte d’un voile lui masquant le visage se dessine au rouge à lèvres une bouche et des yeux sur le tissu …Une image troublante, qui accentuée par une lounge music polyglotte à la sensualité toute latine, ensorcèle et interpelle la horde d’ Anglais déjà bien alcoolisés. Bossa nova d’un autre millénaire ? Electro-salsa-funk ? Samba-dub-punk? Le premier album éponyme des Brazilian Girls, sorti en février 2005 avait déjà éveillé les questions de style et brouiller nos pistes auditives. Mélanges savoureux de dance tropicale et de pop plus occidentale, les rythmes chaloupés et plein d’humour des Brazilian Girls draguaient de façon putassière mais séduisaient sans difficulté.
Le deuxième album, Talk To La Bomb, enregistré dans le studio d’Hendrix (l’Electric Lady à New York) affine le propos. Moins house que son prédécesseur, Sabina Sciubba, la chanteuse du quatuor, le définit comme une bombe « melting pop » et « emo electro ». « Emo c’est pour « émotionnel ». » Et en la rencontrant, on n’est pas au bout de ses émotions… La cynique perverse Formé en 2003 à New York, les Brazilian Girls se sont rencontrés au Nublu, un « tout petit club de l’East Village. Le propriétaire est moitié suédois-moitié turque et il a épousé une Brésilienne. Son lieu est un endroit très spécial et cosmopolite : on y trouve des vieux poètes de la beat generation, des mannequins droguées (pléonasme ?), des branchés, des DJ’s, des peintres, bref des artistes de tous les âges ayant pour seul point commun l’envie de s’évader et de recréer quelque chose d’amusant et d’innovant ». Comme les Brazilian Girls qui avant de jammer ensemble, écumaient chacun des milieux très différents. « Jesse, le bassiste, jouait dans un groupe de punk. Aaron, le batteur, officiait avec des musiciens argentins venant du tango. Le claviériste, est natif de Buenos Aires et c’est un fan de jazz. On a ensuite tout mélanger de manière très démocratique. » Mais Sabina donne seule ses interviews. Sans doute parce que c’est la créature la plus stupéfiante du groupe. Née à Rome, elle a parcouru le monde, chanté à l’âge de 13 ans dans une formation jazz, vécu à Nice avec sa mère peintre. Du coup, elle chante en cinq langues et répond à nos questions dans un parfait français. « J’ai vécu un peu partout, notamment à Munich, où je faisais l’actrice à la télé. J’ai aussi joué dans un film d’Amos Kollek récemment. Je ne m’enflamme pas trop parce que je n’ai vu aucune image et que je redoute le résultat. Je jouais une chanteuse d’origine allemande et arabe à l’opposé de l’héroïne, une jeune chanteuse innocente arrivant d’Israël et qui manque de mourir à cause de la cocaïne que je lui donne. Dans ce film, je suis la cynique droguée et perverse, toujours en train de fumer de l’herbe.
On se demande pourquoi ?» Des chattes et de l’herbe C’est que le groupe a toujours eu à dealer avec cette image un peu « fumeuse ». Le refrain du tube qui les a rendus célèbre disait à peu près ceci : « Pussy, pussy, marijuana ». « Pour beaucoup, nous sommes le groupe qui a chanté « Pussy marijuana » ! On nous passe tout le temps des joints sur scène. Parfois, j’ai presque envie que la police s’en mêle. Ca me forcerait à retourner en Europe ! Je plaisante. Mais aux Etats-Unis, ce titre n’a pas la même valeur qu’ailleurs. « Pussy » ne peut pas passer à la radio, ni à la tv là-bas; Pourtant, il ne parle pas de sexe mais de censure et d’hypocrisie, il s’agit juste de provoc’. Pour moi tout est permis. Tout le monde a besoin de drogue. Les gens qui n’en prennent pas sont nymphomanes ou se goinfrent de chocolat. Chacun a ses vices !» Sue Ellen à poil Surnommée « Sue Ellen » par des tourneurs, Sabina s’est dernièrement pourtant un peu calmer. « Quand tu tournes, c’est important de se créer un espace de calme et de ne pas trop faire la fête. J’ai tellement tiré sur la corde la première année, que j’en suis sortie épuisée. Les mecs continuent eux : peu de sommeil, beaucoup d’alcool, ils ne vont pas faire de vieux os, c’est sûr ! (rires) Parfois c’est dur de voyager avec sept mecs sur un bus ! J’ai envie de parler de Tampax et d’avoir des amies ! » Mais quelques verres plus tard, Sabina se laisse aller : « J’ai grandi avec un grand manque de tabous. Chez moi, à Rome, on pouvait parler de tout. Les Italiens emploient tous les trois mots celui de « chatte ». C’est pour ça que j’aime vivre aux Etats-Unis, pour ridiculiser les gens prudes, qui en oppressant, engendrent la perversion. Récemment, j’étais à Porto Rico sur une plage, nue, car j’avais oublié mon bikini. C’était désert à part un vieux couple d’américains scandalisés dont la femme a écrit dans le sable « no nudes » alors que je me baignais. Quand je suis sortie, elle a commencé à m’insulter : « Les gens ici… » La plage était totalement vide. C’était quoi son problème ? Elle n’a pas aimé la manière dont son mari me regardait ou bien ? » C’est ça le problème avec les bombes…toujours prêtres à exploser !
Talk To La Bomb (Verve Forecast) www.braziliangirls.info www.myspace.com/braziliangirls
vendredi 26 février 2010
Edito de Kultorama - printemps-été 2010 - thème "The Escape"
Ça a commencé sournoisement. Il y a quelques mois de cela. Un premier pote annonce qu'il quitte son super job dans une super boîte avec de super responsabilités (et un super stress) pour faire de la sophrologie. Une amie lui emboite le pas : Ancienne programmatrice d'un gros club, elle veut se consacrer au tricot pour animaux et faire des massages à domicile, une autre connaissance démissionne d'une grosse agence de pub pour faire du folk de barbu. Quand c'est pas un ami d'ami qui arrête la musique pour faire du fromage bio dans un bled près des Pyrénées. Moi même, sur les conseils d'un ami DJ je me renseigne pour faire une retraite de quelques jours dans une abbaye. Comment en est on arrivé là ? Trop de raclettes entre amis annulés, trop de piles de livres fabuleux en retard, de disques (mp3) qui s'entassent dans le disque dur, de trajets en métro pénibles à se regarder en chien de faïence, de mauvaises blagues de bureau entendues à la machine à café. Et c'est pas prêt de s'arranger...le lip dup de l'UMP, la crise généralisée, le taux de chômage (et surtout les employés du Pole Emploi), les photos de traders rougeauds, autant de plaies qui n'inspirent qu'une chose : la fuite.
Il y a quelques jours justement ma mère (marseillaise) me parle d'un certain Henry Quinson, devenu le nouveau héros local depuis la publication de son autobiographie au titre évocateur Moine des cités, De Wall Street aux Quartiers-Nord de Marseille (éditions Nouvelle Cité/Prix 2009 de littérature religieuse). Le type enchaîne les télés et les radios en racontant sa vie. Son histoire? Ce franco-américain était un jeune banquier d’affaires (le golden boy typique) qui gagnait et flambait des millions de dollars avant de tout plaquer pour vivre dans un monastère en Savoie et habiter ensuite une cité HLM dans les Quartiers-Nord de Marseille. Il y a fondé une fraternité d'aide et d'échange. « Ce lundi matin 16 octobre 1989, je ne peux résister à la force qui m’habite. Je me lève : je dois démissionner… » raconte il dans son livre. Ca fait rêver. Et réfléchir. L'histoire du mec qui en a marre de sa putain de vie, plaque tout…et ne se retourne pas. Jamais.
Sans avoir suffisamment de couilles (ou d'armes ou de vêtements de cuir assez rutilants) pour exploser le système, on se calme les nerfs, on s'évade en écoutant le courant musical à la mode, la « chill wave ». Ca fait quelque temps qu'on n'écoute plus que ça, qu'on a d'yeux que pour la musique baléarique, tropicale ou cosmique. Le prochain Vampire Weekend s'annonce afro-pop, les percussions entendues chez Damon Albarn et ses derniers projets nous font prendre la tangente vers une contrée ensoleillée, et plus récemment Friendly Fires, Wavves, Neon Indian, Washed Out, Memory Cassette ou Fool's God enchantent par leur exotisme. On appelle ça l'escapism chez les Anglo-saxons: face à la crise, on fantasme un ailleurs musical meilleur.
En attendant, pour fuir un peu le morne quotidien, voici déjà une solution altenative, la lecture de ce numéro du Kultorama sur le thème « the escape » (du titre de la collection Kulte). On s'évadera avec un article sur la théorie du savoir revivre de Jacques Massacrier (principale influence sur cette thématique), la folie douce et la pop qui voit loin de Maman Records, les rythmes exotiques de Get Back Guinozzi!, le maxi galactique de Jan Turkenburg (le bien nommé « In My Spaceship »). On rêvera avec les illustrations poétiques de Stephane Manel. On se lovera dans du coton bio et on fera connaissance avec le magazine gratuit et « open-mind » Redux. Bon voyage!
Violaine Schütz
The Horrors - Chronique publiée dans le TSUGI n°19
The Horrors Primary Colours (XL/Beggars) De The Horrors, on a une image d'Épinal. Celle de cinq freaks anglais complètement goth (ils portent tout l'attirail croix-redingote noire et mascara qui coule du Dracula moderne), jouant un rockab de corbac (sur un premier album, plutôt flamboyant, « Strange House » sorti en 2007). Mais rien, si ce n'est un clip signé du grand Cunningham (ressorti d'une retraite spécialement pour leur beaux yeux cernés pour filmer leur tube punk « Sheena is a parasite » et devenu depuis leur co-producteur) ne laissait présager de quoi était vraiment capable le sanglant quintet. Dès les premières notes- incroyables de panache- de « Mirror's Image », l'entrée fracassante de leur nouvel album, Primary Colours, Bauhaus se retire, pour accueillir une densité électronique digne de Brian Eno. Dès lors, la redingote anthracite côtoiera systématiquement la lumière du jour, celle d'un jour nouveau, celui de l'illumination analogique. Alors certes les guitares sont toujours grinçantes (« Three Decades », du Interpol au sommet) mais l'orgue hypnotique (celui de Nico, période new-wave) et dansant lui vole constamment la vedette. Dans un donjon troué de lumineuses envolées shoegaze, la voix ressucite Ian Curtis et les Chameleons, mais la basse swingue, la pop lyrique (école Echo & the bunnymen) s'en mêle, et Geoff Barrow (de Porstishead) à la prod, berce le tout d'une belle douceur dub. On le savait certes depuis le plus premières heures du post-punk, la mort peut danser. Mais on ignorait encore qu'en 2009, elle pouvait enchaîner des chorés aussi magiques. De la « dance » macabre magnifique, voilà ce que ces cinq horreurs ont inventé avec leurs couleurs primaires. Et aucun kid fluo n'a jamais fait plus beau ! (Violaine Schütz)
Boys Noize Interview - Papier publié dans TSUGI
dimanche 21 février 2010
Empire Of The Sun Interview - Article publié dans le TSUGI n°17
Empire Of The Sun
Texte de Violaine Schütz
Après Modular et les Midnight Juggernauts, l'empire australien a enfanté d'un autre fantasme hype : Empire Of Sun, groupe à la fois fluo, électro, pop et cosmique. Mais derrière le make-up outrageant et le discours fumeux, ces MGMT version 80's ont plus de tubes dans leur besace à franges et paillettes. Rencontre aux allures de LSD trip avec deux androïdes d'une nouvelle ère.
A quoi ressemble le son de 2009? Très exactement à Empire Of The Sun, duo australien formé en 2007 par Luke Steele (guitariste et chanteur des très bons Sleepy Jackson) et Nick Littlemore (moitié des excellents Pnau), dont le premier album, Walking On A Dream, résume à lui seul toutes les tendances du moment. On y trouve les mélodies d'électro-pop baléarique plaisantées par tous les hipsters, une production 80's très léchée proche dans l'esprit de celle tentée à Nantes autour du blog Valérie (Minitel Rose, Anoraak), et en Australie par le label Modular et surtout cette volonté si post-moderne de remettre au goût du jour des références de très mauvais goût comme Fleetwood Mac, ou-pire- Kajagoogoo. on comprendra pourquoi, le premier album de l'Empire du soleil, s'impose comme le fantasme ultime et éblouissant du branché moderne qui n'hésitera pas d'ailleurs pas à crier aux « nouveaux MGMT ». D'un autre côté, on comprend bien comment Empire Of The Sun, et son délire costumé « boule de cristal-tigre du bengale-mocassins blancs-patchouli-voix lactée» va s'imposer en cauchemar absolu pour le nerd fan de fugazi ou l'amateur d'électonica mentale et pointue ; Mais le propos d'Empire OF The Sun n'est pas de complexifier la pop musique, à la manière d'un Metronomy ou d'un Hot Chip, mais plutôt de renouer avec une certaine notion de l'amusement, du divertissement et de la musique comme spectacle étonnant. C'est la grandiloquence de Bowie quand il inventait un personnage, le show-off des séquences déguisées et maquillées hilarantes de Phantom Of Paradise et Rocky Horror Picture Show, le ridicule des pires heures du glam rock et surtout, tout le mouvement néo romantique des années 80, que les deux zinzins australiens d'EOTS ressuscitent en trente minutes chrono d'interview de visu. A la manière d'un Adam Ant, qui à travers ses costumes de pirate new-wave apportait à une pop FM devenue chamallow un peu plus d'imagination, de folie, et d'excentricité, interviewer Empire Of The Sun, c'est retenir une crise cardiaque par seconde face à un décorum -sans doute un peu calculé- aussi et kitsch et flamboyant qu'hors du commun. Dans un cadre parfaitement adapté-le très rococo hôtel Murano, ses crocodiles en plastoc, son faux feux de cheminée, ses moquettes d'ascenseur strassées- le duo reçoit en toute simplicité dans une chambre avec piscine sur la terrasse. Assis sur le canapé blanc, Nick (programmation), sosie du beau gosse de MGMT, quelques cheveux blancs en plus, porte une djellabah de velours noir brodé, et une volumineuse coiffe de plumes indienne, sur des baskets et un jean. Plus fort encore, Luke (chant, guitare) se tient à ses côtés, paré d'un maquillage futuriste très San Ku-Kaï, de cheveux blond platine en pétard, d'un caftan rose fuchsia, de pendentifs hippies fleuris, de pantoufles et -pour couronner le tout- d'une énorme tiare dorée à pompons oranges. Tout en finesse, à l'image de leurs photos promos dignes des meilleurs tableaux d'héroïc fantasy à licornes abandonnés chez Emmaüs. On ne pouvait donc dignement pas s'attendre à ce que leurs réponses soient fades, ou sensées.
Vous souvenez vous précisément de votre première rencontre?
Nick : Oui, très bien. La première fois que j'ai rencontré Luc, c'était en 2000, à Sydney, et il portait tout le temps une grosse valise en cuir avec lui, qu'il ne lâchait jamais à tel point que je me demandais ce qu'elle pouvait bien renfermer. Il n'arrêter pas de faire des pauses pour regarder ce qu'il y avait dedans; Au bout d'un moment, je lui ai demandé si je pouvais jeter au œil au contenu. Il l'a ouvert, et dedans, se trouvait une mini forêt tropicale avec des petites grenouilles vivantes et des petits arbres luxuriants. C'était totalement incroyable, magique. Le jour d'après on a commencé à bosser ensemble dans mon studio et il avait encore sa valise. Je lui ai demandé si il avait amené les grenouilles avec lui. Il m'a dit « non, pas aujourd'hui ». J'ai vu que la valise brillait, il l'a ouverte, et c'était comme une boite à musique recréant une mini discothèque avec de la musique électronique. Et à chaque fois que je l'ai revu les premières années, il avait toujours un truc différent dans sa valise, c'est ce qui m'a fait comprendre que je voulais vraiment faire de la musique avec lui.
Quels genres d'ados étiez vous?
Nick : J'étais très timide et j'avais peur des filles. J'avais même pas de sœur, alors je ne savais pas ce que c'était. A la place, j'avais un grand frère vraiment bizarre, un gothique, avec de longs cheveux noirs. Dès l'âge de 14 ans j'ai commencé à faire de la musique pour m'occuper parce que je me faisais vraiment chier dans la vie.
Luke : Moi j'étais un ado pas cool du tout, personne m'invitait aux fêtes organisées par l'école. A lors j'avais crée un studio au sous sol de l'appart de mes parents appelé le donjon dans lequel je descendais avec mon quatre pistes et une caisse de six bières; C'était mon secret, j'invitais personne au donjon. Et surtout pas les kids cool.
Quand avez vous su que la musique deviendrait toute votre vie ?
Luke : Mon père était musicien, et il l'est toujours, (il s'agit du chanteur de country-blues assez ringard Rick Steele, ndr).Quand j'avais 12 ans, il restait au pub jusqu'à pas d'heure et parfois il m'amenait avec lui. Il y avait aussi toujours plein de jolies filles partout où on allait, des pédales d'effet à la maison et on faisait des trucs géniaux comme aller pécher dans l'Est de l'Australie, ensemble. Ça ma donné envie de cette vie là : rester éveillé jusqu'à six heures du matin, en buvant des bières.
Nick : Quand j'ai eu 11 ans, j'ai eu une caméra en cadeau, puis j'ai commencé à filmer un peu n'importe quoi. J'avais tout un tas de films expérimentaux, et je voulais une bande son. C'est alors que j'ai débuté dans de la musique totalement inaudible, conceptuelle et bruitiste avec des boîtes à rythme.
Et votre album pourrait justement être une bande-son de film?
Nick : Exactement! D'ailleurs, dès qu'on a commencé à enregistrer l'album, on a pensé à faire un film en même temps. Pour nous, le cinéma est la forme d'art la plus globale et le son est aussi important que l'image dans notre démarche. C'est pour ça qu'on a tourné le clip « Walking on a dream » à Shanghai, et d'autres scènes au Mexique, avant d'aller en Islande, à Las Vegas et en Afrique. Le tout formera un film initiatique dont l'inspiration première est La Montagne Sacrée, d’Alejandro Jodorowsky (1973). On y voit une sorte de Christ nu en quête de lui-même. Mais on est aussi très inspirés par l'univers de Peter Greenaway, Chris Marker et Truffaut. On a pensé l'album comme un scénario avec diverses séquences qui constituent les étapes d'un voyage particulièrement épique et coloré. Un vrai road movie spirituel! Notre album es une histoire, pas une collection de chansons!
Et Empire Of The Sun, c'est un long métrage de Spielberg, adapté de J.G. Ballard, c'était pour le film ou le livre que vous avez choisi ce nom?
Nick : Pour aucun des deux, c'est par rapport à la puissance du soleil, qui nous accompagne partout, et fait partie intégrante de toute notre existence. (A ce moment là, un rayon lumineux envahit la chambre). D'ailleurs, est-qu'on peut se déshabiller? (il fait très chaud tout d'un coup. Ils enlèvent leurs couvres chefs respectifs. Et boivent un peu de vin blanc.)
Tsugi : Allez-y, je ne tourne pas de film.
Nick : Tu veux prendre un bain dans la piscine? (Je décline poliment l'invitation pendant que Luke trempe un pied dans l'eau qui a l'air glacée, ndr)
Vous semblez vouloir délivrer un message à travers votre musique un peu mystique, quel est-il ?
Nick : On veut faire quelque chose qui n'a jamais été fait, et dépasse tout ce qui existe. Nous avons crée des personnages et tout un empire qui va avec. On veut changer le monde grâce à notre musique et ce qui l'entoure, y mettre un peu plus de pureté, de joie et de spectaculaire!
Walking On A Dream (EMI)
www.myspace.com/empireofthesunsound
mardi 9 février 2010
Get Back Guinozzi !
publié dans TSUGI
Get back Guinozzi!
Psycho-pop
Avec leur mix de reggae, post-punk, musique tropicale et surf 60s, les français de Get Back Guinozzi! livrent avec « Carpet Madness » une réponse enjouée à l'exigeante excentricité des américains d'Animal Collective. Et si GBG! était la meilleure chose qui soit arrivée à la pop frenchy depuis Elli et Jacno?
Dans un café face à la Gare du Nord, une jolie brune en veste imprimée « jungle et fauves », et rouge à lèvres rouge sang, sirote un jus d'ananas : « C'est moi Eglantine Gouzy, Indiana Jones de la musique. J'ai eu un accident à la jambe il y a quelques années suite auquel j'ai du resté enfermée à la maison pendant deux ans. Après ça, j'avais envie de faire de la musique autrement, ne ne pas m'installer musicalement ou intellectuellement. Je suis partie en 2008 dans la jungle indienne. j'étais comme Mowgli dans la forêt, je chantais comme un babouin, c'est là que j'ai été recontactée par mon ami Fred. »
C'est ainsi qu'est né Get Back Guinozzi!, le projet d'Eglantine Gouzy, ex étudiante aux Beaux-Arts, parisienne exilée à Londres de 35 ans, compositrice de no-wave arty sur une compilation du label allemand Monika (For Woman No Cry en 2005) et un premier album éponyme solo foutraque (en 2006), et Fréderic Landini. Tout aussi électron libre, ce dernier vit à Toulon, affiche 46 ans au compteur et une âme d'adolescent. Après avoir fait partie d'un collectif de hip hop dans le sud, et lancé plusieurs sound-systems reggae, Fred dirige le défricheur Midi festival à Hyères. Autant dire que l'union de ces deux figures atypiques ne pouvait qu'être fantasque.
Sauf qu'en vérité, la musique du duo est encore plus dingue. Carpet Madness, le premier album farfelu de GBG!, compile tout à la fois le Cure des débuts pour son exotisme, Ariel Pink pour les délires lo-fi, le sens de la mélodie nostalgique des Smiths, la folie des Talking Heads, mais aussi le minimalisme élégant des Young Marble Giants. « On fait de la musique en toute liberté, raconte Fred, alors qu'on évolue dans un monde hyper codé. C'est pour ça qu'on a aimé les images montées par Jean Luc Charles, photographe et réalisateur pour le Midi Festival, qui a compilé pour notre premier single, « Low Files tropical » des archives hédonistes d'une boite de nuit qui appartenait à son père à Bandol, dans les années 70. Ce lieu a été plastiqué plusieurs fois. »
« Libertaire » c'est le mot qui convient le mieux aux chansons de « Carpet Madness », aussi bien musicalement parlant (on navigue sans arrêt entre voix pop naïve, reverb caribeenne, percussions afro et beats électronica) que textuellement. Les paroles d'Eglantine, fantaisistes à souhait, partent à peu près dans tous les sens et invitent à se défaire de toutes nos habitudes en matière de clichés rock. « Pour le morceau « Carpet Madness », le point de départ c'est Saint Macloud, enfin l'équivalent du marchand de tapis en Angleterre. J'ai une photo terrible de moi devant la vitrine où j'ai l'air d'une folle, et j'ai eu des histoires très compliquées dans ce magasin. Il y a aussi du Ariel Pink, du Gainsbourg dans les influences. « L.A » c'est Donna Summer rencontre Bret Easton Ellis. Mais il y a aussi Morrissey, King Kong, Elvis, Roy Orbison dans cet album. En fait, je joue tous les personnages à la fois, ce qui est complétement schizo, je l'admet. »
Schizo, certes, mais surtout jouissif pour l'auditeur blasé, qui ne peut être fou de joie à l'écoute de tant de fraicheur et d'inventivité.
Carpet Madness (Fat Cat/Discograph)
www.myspace.com/getbackguinozzi